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La mode des conclusions hâtives dans les médias


« Untel déjà champion ? », « La faiblesse de la Ligue 1 »... Autant de marronniers exploités par des analystes peu scrupuleux et prompts aux conclusions hâtives. Prématurées, de telles rengaines souffrent d'une faiblesse argumentative, mais font vendre dans des médias en quête de sensationnel. Il faut avoir un avis tranché, définitif, peu importe s'il sera contredit la semaine suivante. La tendance est au retournement de veste.



« La Ligue 1 est relancée »

Les conclusions hâtives concernent tout d'abord, et ce pratiquement de manière hebdomadaire, la Ligue 1. Après chaque journée de championnat, des conclusions définitives sont tirées pour le reste de la saison. Une défaite d'une équipe du peloton de tête et elle peut faire une croix sur le titre. Une victoire, et elle s'envole vers le sacre. En décembre 2009, les Girondins de Bordeaux étaient ainsi prétendument déjà sacrés champion à la trêve. Impossible de les imaginer perdre leurs neuf points d'avance sur les dix-neuf matchs restant. Et pourtant, l'équipe de Laurent Blanc a fini l'exercice 2009/2010 à la 6e place, sans qualification européenne. Marseille avait été sacré. Un championnat se joue sur le durée, et fonctionne par cycles, par série. Tirer des conclusions sur la réussite d'une saison à mi-chemin est prématuré. L'OM est l'objet privilégié de telles sentences. Un temps médiocre, puis montant en puissance, puis décevant à nouveau, voire en crise, les vestes se retournent de semaine en semaine. Gignac et Brandao n'ont un jour pas le niveau pour évoluer sur la Canebière, et seraient les hommes de la situation le lendemain après deux buts respectifs.

Cette frénésie du jugement à court terme se traduit également par les multiples « relances » du championnat. Chaque semaine, le suspense est tué, puis la Ligue 1 relancée, puis le suspense à nouveau relancé, et ainsi de suite. Si cette saison fait exception, grâce à une lutte serrée en haut de tableau, elle ne devrait pas échapper à la règle dans les mois à venir. La vérité du jour n'est pas celle du lendemain, surtout en football. Qui dit que le PSG, aujourd'hui présenté comme un modèle de vertu, de beau jeu, vanté pour ses résultats, présenté comme un favori pour le titre, ne va pas vivre une série noire le reléguant en milieu de tableau ? Nul doute que les commentaires sur la politique menée par Robin Leproux et sur les talents d'entraîneur d'Antoine Kombouaré seraient moins dithyrambiques... Autre exemple parmi tant d'autres : le 22 janvier dernier, lequipe.fr évoque les problèmes des Girondins de Bordeaux : « Jean Tigana pourra dire ce qu’il veut, Bordeaux est très certainement la plus grosse désillusion de la saison. » La mi-saison est à peine passée... « Wait & see », en somme.

« Le déclin de l'Europe »

Mais la France n'est pas la seule touchée par le fléau des conclusions hâtives. Lors de la dernière Coupe du monde en Afrique du Sud, le thème à la mode au sortir des phases de poule était celui du déclin de l'Europe. Certaines nations ayant déçu (France, Italie...), le Vieux Continent était sur la pente descendante. Sauf que la suite de la compétition a démenti cette tendance. Avec trois équipes sur quatre en demi-finales, et un Espagne – Pays-Bas en finale, l'Europe a au contraire été le continent le plus performant. Là aussi, il aurait fallu attendre la fin du Mondial pour juger, et se garder de tirer des conclusions prématurées. Mais revenons sur l'hexagone. Pas plus tard qu'il y a deux semaines, à l'occasion des 32e de finale de Coupe de France, on aurait assisté à l'illustration de la baisse de niveau des clubs de Ligue 1, du nivellement par le bas du football français. Dix clubs de l'élite avaient été éliminés. Les défendeurs de cette thèse auront l'air fin si, à l'issue des 8e de finale disputés les 1er et 2 février prochains, il y a sept clubs de L1 en quarts sur huit, comme c'est possible, voire probable.

La quête de sensationnel

C'est là l'une des principales tares du système médiatique. Il n'y a aujourd'hui pas de place pour la mesure dans les médias, surtout audiovisuels. Il faut du sensationnel, des opinions tranchées, pas de mise en perspective. Tout doit être commenté, des conclusions doivent être tirées. Tout est noir ou blanc, il n'y a pas d'intermédiaire. Il faut dire que les formats de nombres d'émissions ne favorisent pas le développement d'argumentations réfléchies et poussées. Le « one man show » de Pierre Ménès dans le Canal Football Club en est la meilleure illustration. Face à l'overdose médiatique autour du football, chacun cherche à créer la sensation, quitte à être discrédité par la suite. Le thème de la faiblesse du football français est très vendeur, et alimente les discours populistes, que les auteurs expriment à la moindre occasion, même lorsque c'est prématuré. Au mépris du bon sens.

2 commentaires:

Milly a dit…

Très bon article !

Julien a dit…

C'est tellement vrai... Même à l'échelle d'un match, si une équipe prend l'avantage à la 72e, combien de fois on entend "ça va leur faire du bien cette victoire...". Y'a qu'à prendre l'exemple du Newcastle-Arsenal de ce week-end pour être persuadé que RIEN n'est joué d'avance! Et au final ça ne dérange personne ce genre de comportement, quitte à passer pour un parfait imbécile. Le ridicule ne tuait déjà pas avant, il tue encore moins aujourd'hui...

(au passage, un truc qui m'énerve (mais qui ne concerne pas ton blog fort heureusement ^^), ce sont les fautes de grammaire et d'orthographe de plus en plus nombreuses dans la plupart des articles (même dans de grands quotidiens...), et les expressions inventées et ridicules qui apparaissent petit à petit. Mais il s'agit d'une autre histoire!) ;-)

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